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Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/132

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IV



Charles fut enterré le lendemain. Si jamais j’eus le vertige sur ma planche à ras du sol, ce fut bien ce jour-là. Je revois une à une les moindres scènes. Elles se juxtaposent pour recomposer un tout qui me remplit de confusion et de remords. Pourtant, il n’y eut pas de ma faute.

J’en reviens au moment de la lettre. Maman accourut à mon cri et me ramassa dans l’escalier. Je ne sais pas au juste ce qui suivit. Un verre qu’on me présenta fila hors de mes mains par terre. Je regardai longtemps les morceaux. Dans la soirée, j’entendis vaguement une discussion entre maman qui trouvait préférable que je n’aille pas « là-bas » et papa qui ripostait :

— S’il ne va pas, il se mettra un tas de choses en tête. Ce sera pire.

Je me trouvais entre eux, je pensais : « Il est mort. Il est mort » sans pouvoir pleurer, aussi absent que si j’eusse été, moi-même,