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Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/209

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et sans toujours me donner raison, me devinaient mieux. Nous lisions. Ah ! Dupéché et son nez sur la joue de sa Louise ! Si j’y pensais, c’était pour me dire qu’ici je n’avais pas le désir de ces grossièretés. Je ne m’inquiétais pas que je fusse une bourrique. Quand un passage lui plaisait, elle me le lisait. Il était toujours fort beau. J’en cherchais aussi. Ils ne valaient pas les siens. Je lui montrai la phrase au sujet de la planche et du précipice dans Pascal. Je lui dis combien certains événements, sans importance pour d’autres, me semblaient singuliers et me donnaient le vertige. Elle me demanda lesquels. Au moment de répondre j’eus une pudeur et ne répondis rien. Ce jour-là, elle me donna un beau regard comme certaines infirmières ici ou comme elle en donnait sans doute à ses petites élèves « qu’elle aimait tant ».

Un soir, tout à coup, se dressa entre nous le visage de Charles. Je le vis comme on se voit dans un miroir. Il me regardait avec reproche. Sa bouche se fermait tristement. Quand elle s’ouvrit, au lieu d’un vide entre deux dents, elle n’avait plus de dents. Je sentis un grand mal. J’en pourrais indiquer la place : là dans la tête près de la nuque ; là près du cœur où cela pinça. Peut-être certaine idée me pesait-elle depuis longtemps. Jeanne