Aller au contenu

Page:Bailly - Histoire financière de la France, depuis les origines de la monarchie jusqu’à la fin de 1786, tome 1.djvu/174

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Une grande partie de leurs produits servit à payer les premiers frais d’une entreprise chevaleresque à la tête de laquelle était Jean, fils du duc de Bourgogne, qui fut prisonnier de Bajazet; et, dix années encore après le commencement de ces perceptions, les receveurs, tant français que grecs, étaient recherchés et poursuivis dans les différentes provinces du royaume où ils s’étaient retirés afin d’éviter de rendre compte [1].

Ces exactions multipliées n’étaient que le prélude de calamités plus grandes qui allaient affliger la France pendant les fréquentes aliénations d’esprit qu’éprouva l'infortuné Charles VI. Bientôt le royaume fut en proie à toutes les déprédations, à tous les désordres, pendant la guerre civile que la rivalité ides maisons de Bourgogne et d’Orléans alluma. A la faveur des partis qui déchiraient l’état, les seigneurs et leurs adhérents, maîtres de l’administration des provinces, sous le titre de lieutenants du roi et de capitaines généraux, s’attribuant le produit des aides, des tailles et des domaines, qu’ils employaient au soutien de leurs funestes querelles, faisaient rétrograder l’état vers ces temps malheureux qui avaient marqué le déclin de la seconde race. De leur côté, les princes, chefs des factions opposées qui ruinaient la patrie, semblaient n’aspirer au gouvernement que pour s’emparer du maniement des finances; véritable sceptre du pouvoir usurpé. Dans les révolutions rapides que la force ou la ruse opérait, le parti triomphant manifestait son avènement à l’autorité par de nouvelles impositions, dont une révolution contraire livrait le produit au parti opposé.

  1. Ordon. du Louvre, t. 8, p. 315, et t. 9, p. 427 et 433.