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Page:Bainville - Bismarck.djvu/158

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que la Prusse au début du XIXe siècle. Les idées révolutionnaires tombant dans cette anarchie furent loin de rénover le pays. Elles furent conseillères d’abandon, et de division. Elles furent tout-à-fait d’accord avec les tendances d’un roi timide, irrésolu, nullement porté à l’action. Elles déterminèrent une grande crise de pacifisme qui, comme toujours tourna à la guerre, au désastre et à l’invasion.

Les rares Prussiens qui, avant 1806, conservaient du patriotisme et pressentaient les catastrophes, rendaient d’ailleurs responsables de tout le mal les « mensonges français ». Le mot est de Marwitz, un Junker, un hobereau, mais qui était de cette noblesse prussienne frédéricienne, militaire, fidèle, au service, et non de la séditieuse noblesse féodale. Marwitz écrit dans ses Mémoires :

Les savants isolés, le tiers-état éclairé, avaient formé un puissant parti qui entraînait après lui les mauvais et les faibles ; l’armée même était divisée. Tout ce qui avait séjourné dans les nouvelles provinces s’était familiarisé avec les mensonges français ; tout ce qui, mis en rapport avec le tiers-état éclairé, s’était entiché des nouvelles doctrines, était devenu antibélliqueux et ne pouvait servir.

D’ailleurs, quand Marwitz avait proposé aux États de la Marche électorale une adresse au roi, qui lui offrait les services, les biens et le sang de la noblesse pour le salut de la patrie, il s’était heurté à un refus. On ne l’avait, même pas compris. C’est pourquoi Godefroy Cavaignac résume dans ce commentaire lumineux la situation :