Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/260

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geois radicaux, délégués du républicanisme bourgeois et comme tels ennemis du socialisme révolutionnaire, ennemis naturels de la révolution vraiment populaire. Cet antagonisme de la révolution bourgeoise et de la révolution populaire n’existait pas encore, en 1793, ni dans la conscience du peuple, ni même dans celle de la bourgeoisie. On n’avait pas encore démêlé de l’expérience historique cette vérité de tous les temps, que la liberté de toute classe privilégiée et par conséquent aussi celle de la bourgeoisie, était fondée essentiellement sur l’esclavage économique du prolétariat. Comme fait, comme conséquence réelle, cette vérité avait toujours existé, mais elle avait été tellement embrouillée avec d’autres faits, et masquée par tant d’intérêts et de tendances historiques différentes, surtout religieuses, nationales et politiques, qu’elle ne s’était point encore dégagée dans sa grande simplicité et clarté actuelle, ni pour la bourgeoisie commanditaire du travail, ni pour le prolétariat, par elle salarié, c’est-à-dire exploité. La bourgeoisie et le prolétariat étaient bien ennemis naturels, ennemis éternels, mais sans le savoir, et par suite de cette ignorance, attribuant, l’une ses craintes, l’autre ses maux, à des raisons fictives, non à leur antagonisme réel, ils se croyaient amis — et se croyant tous amis, ils marchèrent unis et contre la monarchie et contre la noblesse et contre les prêtres. Voilà ce qui fit la grande force des bourgeois révolutionnaires de 1793. Non seulement ils ne craignaient pas le déchaînement des passions populaires, mais ils le fomentèrent par tous les moyens, comme l’unique moyen de salut pour la patrie et pour eux-mêmes contre la réaction intérieure et extérieure. Lorsqu’un commissaire extraordinaire, délégué par la Convention, arrivait dans une |17 province, il ne