Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/358

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liberté devant nécessairement aboutir toujours à une déplorable anarchie spirituelle, et |195 que, secundo, elle éprouve toujours, fort heureusement pour la société, le besoin instinctif d’être commandée. Fort heureusement aussi, il se trouve toujours quelques hommes qui ont reçu de la nature la mission de commander à cette masse et de la soumettre à une discipline salutaire, tant spirituelle que temporelle. Jadis, avant la nécessaire mais déplorable révolution qui tourmente la société humaine depuis trois siècles, cet office de haut commandement avait appartenu au sacerdoce clérical, à l’Église des prêtres, pour laquelle Auguste Comte professe une vénération dont la franchise du moins me paraît excessivement honorable. Demain, après cette même révolution, il appartiendra au sacerdoce scientifique, à l’académie des savants, qui établiront une nouvelle discipline, un pouvoir très fort, pour le plus grand bien de l’humanité.

Tel est le credo politique et social qu’Auguste Comte a légué à ses disciples. Il en résulte pour eux la nécessité de se préparer pour remplir dignement une si haute mission. Comme des hommes qui se savent appelés à gouverner tôt ou tard, ils ont l’instinct de conservation, et le respect de tous les gouvernements établis, ce qui leur est d’autant plus facile que, fatalistes à leur manière, ils considèrent tous les gouvernements, même les plus mauvais, comme des transitions non seulement nécessaires, mais encore salutaires, dans le développement his-