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Page:Bakounine - Lettres à Herzen et Ogarev, trad. Stromberg, Perrin, 1896.djvu/101

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Herzen et Bakounine, soutinrent cette idée que l’État russe de leur temps portait une empreinte étrangère, « byzantino-tartaro-allemande » ou « holstein-tartare », comme parodiait Herzen, en substituant le mot tartare à celui de gottorpe. Cette philosophie de l’histoire russe, que les savants russes ne partageaient nullement, était venue bien à propos dans la lutte contre l’absolutisme impérial et c’est pourquoi elle gagna du terrain dans la presse et dans l’opinion publique.

En même temps, le système de Nicolas se renforça du concours d’Allemands (tels que Kleinmichel, Benkendorf et autres), dont la nouvelle école profita également comme d’un argument à l’appui de cette conception historico-politique.

Aujourd’hui, grâce aux progrès de l’anthropologie comparée, tous ces savants systèmes historiques et politiques tombent d’eux-mêmes ; car il a été démontré que les communes républicaines, de même que l’absolutisme bureaucratique, ne présentent que certaines phases dans l’évolution de la vie politique des peuples et que tous les États constitués doivent les traverser. De même, il a été démontré que l’influence étrangère, dans la vie nationale des peuples, est d’un ordre secondaire (telle l’influence des États despotiques de l’Asie sur la Grèce et Rome, du droit byzantino-romain sur l’Europe du moyen-âge, du droit français sur l’Allemagne et de l’Allemagne sur la Russie). Mais, il y a quelques dizaines d’années, ce point de vue nationaliste, ce « messianisme national » paraissait tout à fait naturel dans l’édifice scien-