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Page:Baltasar Gracián - L’Homme de cour.djvu/13

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L’HOMME DE COUR

Mais, à bien philosopher, il n’y a point d’autre arbitre que celui de la vertu et de l’application ; car, comme l’imprudence est la source de toutes les disgrâces de la vie, la prudence en fait tout le bonheur.

XXII

Être homme de mise.

L’érudition galante est la provision des honnêtes gens. La connaissance de toutes les affaires du temps, les bons mots dits à propos, les façons de faire agréables, font l’homme à la mode ; et, plus il a de tout cela, moins il tient du vulgaire. Quelquefois un signe, ou un geste, fait plus d’impression que toutes les leçons d’un maître sévère. L’art de converser a plus servi à quelques-uns que les sept arts libéraux ensemble.

XXIII

N’avoir point de tache.

À toute perfection il y a un si, ou un mais. Il y a très peu de gens qui soient sans défauts, soit dans les mœurs, ou dans le corps. Mais il y en a beaucoup qui font vanité de ces défauts, qu’il leur serait aisé de corriger. Quand on voit le moindre défaut dans un homme accompli, l’on dit que c’est dommage, parce qu’il ne faut qu’un nuage pour éclipser tout le soleil. Ces défauts sont des taches, où l’envie s’attache d’abord pour contrôler. Ce serait un grand coup d’habileté de