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Page:Balzac-Le député d'Arcis-1859.djvu/233

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Aube, ont eu lieu les obsèques et enterrement de Charles Dorlange, qui bientôt après, comme un papillon sorti de sa nymphe, s’est élancé dans le monde, sous le nom et la figure de Charles de Sallenauve, fils de Frauçois-Henri-Pantaléon Dumirail, marquis de Sallenauve. Suit l’historique des faits qui ont précédé cette brillante et glorieuse transformation.

Parti dans la soirée du 1er mai de Paris, que je laissais livré à toutes les joies officielles de la Saint-Philippe, le lendemain dans l’après-midi, conformément à la prescription paternelle, je faisais mon entrée dans la ville d’Arcis.

À la descente du coupé, tu penses bien que mon étonnement ne fut pas médiocre en apercevant dans la rue, où venait de s’arrêter la diligence, cet insaisissable Jacques Bricheteau, que je n’avais pas entrevu depuis notre fatale rencontre de l’île Saint-Louis.

Cette fois, au lieu de procéder à la manière du chien de Jean de Nivelle, je le vois venir à moi, le sourire sur les lèvres, et il me tend la main en disant :

— Enfin, cher monsieur, nous sommes à peu près au bout des mystères, et bientôt, je l’espère, vous ne croirez plus avoir à vous plaindre de moi.

En même temps, ayant l’air de céder à une pressante sollicitude :

— Vous apportez l’argent ? me demande-t-il.

— Oui, répondis-je, ni perdu ni volé.

Et je tire de ma poche un portefeuille contenant les deux cent cinquante mille francs en billets de banque.

— Très-bien ! dit Jacques Bricheteau. Maintenant, nous allons à l’hôtel de la Poste, où vous savez sans doute par qui vous êtes attendu ?

— Mais non, vraiment, repartis-je.

— Vous n’avez donc pas remarqué la qualification sous laquelle la somme vous est parvenue ?

— Au contraire, cette étrangeté m’a tout d’abord frappé et j’avoue qu’elle a beaucoup fait travailler mon imagination.

— Eh bien ! tout à l’heure nous allons complètement dé-