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Page:Balzac-Le député d'Arcis-1859.djvu/265

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gentilhomme côtoie, dit-on, d’extrêmement près la cinquantaine.

Fort connu, ce qui pour lui veut dire fort décrié à Paris, il aurait fait comme les marchands dont les articles sont démodés, il se serait expédié en province et aurait déballé à Arcis-sur-Aube, juste au moment de la foire électorale, estimant avec raison que le mouvement toujours un peu tumultueux de ces sortes de Beaucaires politiques ne pouvait qu’être favorable à la nature légèrement ténébreuse de ses opérations.

Le calcul était bon ; la mort inopinée du jeune Charles Keller, candidat sur le choix duquel s’était d’abord arrêté la pensée du gouvernement, avait jeté dans tout l’électorat d’Arcis une perturbation profonde. Pêchant dans cette eau trouble, monsieur Maxime de Trailles est parvenu à y harponner un candidat que recommandent deux natures de mérites et de convenances bien distinctes.

Au point de vue de la chose publique, monsieur Beauvisage, dont vous vous êtes, madame, très-bien rappelé le nom, a l’inestimable avantage d’avoir battu en brèche et fait crouler la candidature d’un petit avocat du nom de Simon Giguet, qui, au grand scandale du gouvernement, aurait eu l’audace d’aller s’asseoir au centre gauche. Cette exclusion donnée à un impertinent de l’opposition dynastique a paru d’un prix tellement inestimable, qu’elle fait passer sur l’ineptie bien notoire et bien caractérisée du sieur Beauvisage, en même temps que sur la considération du ridicule dont sa nomination ne pourrait manquer de couvrir ceux qui se seront prêtés à la patronner.

Au point de vue de la chose privée, j’entends celle de monsieur de Trailles, monsieur Beauvisage a le mérite d’avoir une fille unique, passablement jolie, laquelle, sans exagération aucune de ses avantages, paraît devoir apporter à son mari une dot de cinq cent mille francs, amassée dans le commerce de ces bonnets de coton dont ma dernière lettre se permettait de parler si peu respectueusement. Maintenant, le mécanisme de l’affaire se comprend de lui-même : faire naître et attiser chez le père, qui jamais ne s’en serait