Aller au contenu

Page:Balzac- Traité de la vie élégante - 1922.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
Théorie

conviction forte : il doit rayonner. Si jusqu’ici les effluves d’une tête embrasée n’ont pas été visibles à l’œil nu, n’est-ce pas un fait admis en poésie, en peinture ? Et s’il n’est pas encore prouvé physiologiquement, certes, il est probable. Je vais plus loin et crois que les mouvements de l’homme font dégager un fluide animique. Sa transpiration est la fumée d’une flamme inconnue. De là vient la prodigieuse éloquence de la démarche, prise comme ensemble des mouvements humains.

Voyez.

Il y a des hommes qui vont tête baissée, comme celle des chevaux de fiacre. Jamais un riche ne marche ainsi, à moins qu’il ne soit misérable ; alors il a de l’or, mais il a perdu ses fortunes de cœur.

Quelques hommes marchent en donnant à leur tête une pose académique. Ils se mettent toujours de trois quarts, comme M. le comte Molé, l’ancien ministre des affaires étrangères ; ils tiennent leur buste immobile et leur cou tendu. On croirait voir des plâtres de Cicéron, de Démosthènes, de Cujas, allant par les rues. Or, si le fameux Marcel prétendait justement que la mauvaise grâce consiste à mettre de l’effort dans les mouvements, que pensez-vous de ceux qui prennent l’effort comme type de leur attitude ?