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Page:Balzac- Traité de la vie élégante - 1922.djvu/195

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DE LA DÉMARCHE

humain obtenu sans un mouvement excessif, matériel ou moral ? Parmi les grands hommes, Charlemagne et Voltaire sont deux immenses exceptions. Eux seuls ont vécu longtemps en conduisant leur siècle. En creusant toutes les choses humaines, vous y trouverez l’effroyable antagonisme de deux forces qui produit la vie, mais qui ne laisse à la science qu’une négation pour toute formule. Rien sera la perpétuelle épigraphe de nos tentatives scientifiques.

Voici bien du chemin fait ; nous en sommes encore comme le fou dans sa loge, examinant l’ouverture ou la fermeture de la porte : la vie ou la mort, à mon sens. Salomon et Rabelais sont deux admirables génies. L’un a dit : Omnia vanitas (tout est creux) ! Il a pris trois cents femmes, et n’en a pas eu d’enfant. L’autre a fait le tour de toutes les institutions sociales, et il nous a mis pour conclusion, en présence d’une bouteille, en nous disant : « Bois et ris ! » il n’a pas dit : « Marche ! »

Celui qui a dit : « Le premier pas que fait l’homme dans la vie est aussi le premier vers la tombe, » obtient de moi l’admiration profonde que j’accorde à cette délicieuse ganache que Henry Monnier a peinte, disant cette grande vérité : « Ôtez l’homme de la société, vous l’isolez. »

Octobre 1833.