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Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/288

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Mais nous qui savons tous combien son cher sourire
         Fut charmant et vainqueur,
Et qui dans son regard avons toujours vu luire
         Un reflet de son cœur,

Soit que la joie à flots verse dans nos poitrines
         Ses trésors épanchés,
Ou que l’ennui morose et les tristes ruines
         Courbent nos fronts penchés,

Nous dirons à la Mort : Pourquoi donc sous ton aile
         As-tu mis le meilleur
De ceux qui nous prenaient une part fraternelle
         De joie et de douleur ?

Paul qui sentait jadis de chauds baisers de flamme
         Sur son front jeune et beau,
N’a pour le caresser à présent, corps sans âme,
         Que le ver du tombeau.

Oh ! n’éprouve-t-il pas dans un terrible songe
         Mille frissons nerveux,
Quand l’insecte, caché dans son orbite, ronge
         Son crâne sans cheveux !

Et pensant à sa vie, à l’aurore si brève
         Qui sur son front a lui,
Nous baisserons la tête, et comme dans un rêve
         Nous pleurerons sur lui.