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Page:Banville - Nous tous, 1884.djvu/131

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NOUS TOUS.


Or, s’attristant à leurs folies,
La vieille marchande d’oublies
Vient et leur parle. Elle a cent ans,
Et dans le fond de ses yeux vagues
Errent, pressés comme des vagues,
Les spectres des anciens printems.

Oh ! dit-elle, chérubins roses,
La sagesse aux clartés moroses
Est ce dont je vous fais présent.
Ces fillettes aux dents pointues
Seront, quelque jour, mieux vêtues
Que vous ne l’êtes à présent.

Tout arrive, en ce monde infirme.
Un jour viendra, je vous l’affirme,
Où ces Gothons et ces Margots
Vous siffleront comme des merles
Et, pour rire, fondront vos perles
Dans leur vin de Château-Margaux.