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Page:Banville - Nous tous, 1884.djvu/221

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NOUS TOUS.


Près du cabaret à la mode
Glissent, comme des strophes d’ode,
Trois femmes dont on serait fou.
Joseph mange son pain d’un sou.

D’autres sortent par ribambelles :
Quelques-unes, blanches et belles,
Une autre, laide comme un pou.
Joseph mange son pain d’un sou.

Plus loin, dans la nuit pâle et brune
Qu’argente un vague clair de lune,
Sur les toits miaule un matou.
Joseph mange son pain d’un sou.

Une fillette aux cheveux d’Ève
Sur la pointe des pieds se lève
Pour baiser son amant, filou.
Joseph mange son pain d’un sou.

Plus loin, sous les blancs rayons brille
Un jardin à travers sa grille,
Aussi beau que le Paradou.
Joseph mange son pain d’un sou.