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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/255

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réellement, il était plus pâle que les vieux portraits qui le regardaient du fond de leurs cadres, avec des yeux qui lui firent baisser les siens. En proie à des pensées inexprimables, à des soupçons plus forts que sa raison, il pénétra sur la pointe du pied dans la chambre de femme, afin de savoir si elle était endormie comme il l’avait laissée et si son sommeil n’avait pas été troublé.

Quand il était parti, elle dormait dans le lit nuptial, sous le mol abri de ses couvertures, le visage pâli, mais calmé, ombragé de ses longues paupières. Quand il revint, il la trouva désordonnément vêtue, la pelisse aux épaules, évanouie au bord de la couche, les mains dégantées, bleuies par le froid, et les pieds ayant encore autour de leurs bottines à moitié lacées, des plaques de neige qui croulaient en eau sur le tapis. Alors il comprit tout… et le hennissement du cheval au Bas-Hamet, et la porte du manoir ouverte, et la blanche Caroline errante sous les dunes, dont lui avait parlé Capelin.