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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/367

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ne l’excuse pas ; car il faut laisser les maris aux femmes. Mais pour nous qui l’avons hébergée, j’n’avons rien à lui reprocher. Bien loin de là ! J’l’ons vue b’en des fois donner aux pauvres qui venaient lamenter à la porte. Elle était généreuse plus que b’en des riches qui ont de belles terres dans le pays.

— Ah ! pour cha, ch’est la vérité, — dit le mendiant Loquet qui s’était tu jusque-là, s’occupant à manger et à boire, au moins pour deux jours. — Ch’est la vérité qu’elle était charitable et pas fière ! Je n’sais pas si elle avait signé queuq’mauvais pacte avec Grille-Pieds, mais c’que j’sais bien, c’est que l’argent qu’elle m’a bouté n’a pas brûlé ma pouquette[1] et qu’elle m’en a donné, à plusieurs reprises, plus que personne depuis que j’rôde dans les environs… Un jour, surtout, que je la rencontrai avec M. de Marigny, qui sortaient tous deux du Tombeau du Diable… Vère ! du Tombeau du Diable !… ce qu’ils y avaient fait, j’n’en sais rien ! mais ils en sortaient. M. de Marigny, qui est grand aussi avec les pauvres, me vida tout son boursicot dans mon grand capet, ma finguette ! ils parlaient grimoire entr’eux, mais elle, la Mauricaude, m’dit qu’elle s’en r’viendrait avec

  1. Pouquette pour pochette. On l’écrit ici comme les paysans normands le prononcent.