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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/38

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qu’elle était la plus aimable des deux. D’ailleurs, si elle tremblait, elle avait ses raisons. Elle était renseignée. Elle savait l’histoire de Vellini. Elle gardait dans sa pensée le récit que lui avait fait Marigny, un certain soir, à sa prière. C’était comme un poème flamboyant à la lueur duquel elle entrevoyait l’influence, possible encore, de cette femme singulière et inconnue. Elle ne l’avait pas aperçue le jour du mariage d’Hermangarde. À ses yeux expérimentés, Vellini n’était pas seulement, comme aux regards plus superficiels de la comtesse, une femme sans jeunesse et sans beauté, n’offrant le danger d’aucun charme. Elle la rêvait toujours comme Marigny l’avait peinte. « S’il l’a peinte comme elle est, quelle puissance ! — pensait-elle ; — s’il ne l’a pas peinte comme elle est, quelle puissance encore pour avoir fait de Marigny un peintre pareil ! »

Mais quoi que fussent ses craintes intérieures :

— « Votre confiance me rassure, ma chère amie, — dit madame de Flers en tendant la main à la comtesse. Et ces deux femmes émues s’embrassèrent comme on s’embrasse en face d’un péril qu’on doit attendre, avec le sentiment fort et toujours jeune d’une immortelle amitié.

— Oui, rassurez-vous, rassurons-nous ! —