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Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/120

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vous, — à sa fille, — à monsieur Néel, mais il n’a pas changé !

— Folle ! alla pour dire l’abbé, — mais il s’arrêta devant ce mot cruel qui exprimait le malheur de toute sa vie. Au moins, ne parlez pas si haut, reprit-il après un silence. Ce mur n’est ni élevé ni épais, et les passants peuvent vous entendre dans le chemin qui est à côté.

— Et quand tout Néhou entendrait ! — fit-elle. Il vous a bien entendu, à matin, monsieur le curé ! Est-ce que la vérité n’est pas toujours connue ?… Est-ce qu’elle ne crève pas toujours la toile des menteries dans laquelle on veut l’envelopper ?… Ah ! monsieur le curé, si vous laissez s’accomplir le nouveau sacrilège que Sombreval veut ajouter à l’autre, est-ce que vous croyez que Dieu, un jour, ne lui brisera pas dans les dents le calice dont il va faire une jouerie, par furie d’amour pour son enfant ?

— Mais qui vous a dit de pareilles choses, la Malgaigne ? demanda l’abbé, sévère comme il l’était toujours quand il rencontrait cette tenace exaltation dont il connaissait la réponse.

— Mes Voix ! fit-elle.

— Oui, toujours vos visions ! dit le prêtre avec la commisération pleine de mélancolie qu’il avait pour toutes les démences, ce pauvre fils de folle affligé. — Mais, ma vieille Malgaigne, j’aime mieux croire à ce que j’ai vu