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Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/124

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tions que le martyre de la douleur ! On regarda comme un miracle que l’abbé Méautis ne mourût point… Il vécut et n’eut pas, en pensant à une action dans laquelle le surnaturel l’avait emporté sur la nature, les pâleurs et les convulsions qui prenaient mademoiselle de Sombreuil, lorsqu’elle pensait au verre de sang qu’elle avait bu pour sauver son père… Plus prêtre qu’homme, l’abbé Méautis n’avait vu que la profanation physique du voile sous lequel Dieu descend dans ses créatures et se fait un tabernacle de leur chair. Mais la poitrine d’un sacrilège, l’indignité du cœur qui allait abuser du pain des Anges était une profanation bien plus terrible que le vomissement involontaire d’un mourant ! Et la Malgaigne, voulant ce qu’elle voulait de l’abbé Méautis, avait fait une chose puissante de le lui rappeler.

Il n’avait rien dit, mais il n’était point passé : il avait même reculé de quelques pas et il méditait en silence. Il était frappé… S’il y avait une exaltation qu’il condamnait dans la Malgaigne, il y en avait une autre qu’il estimait. Nous avons tous nos tentations, pensait-il souvent, ses visions sont ses tentations, à elle. Chacun porte la peine et garde la mauvaise odeur de son péché, imprégnée dans les plis de son âme, même après que des vertus tardives l’ont purifiée.