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Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/7

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parties du monde. C’t’après-midi, quand j’irai porter le pain chez la demoiselle de la poste, j’demanderai à la grosse Eulalie Le Dran, sa servante, s’il n’est rien venu pour la Malgaigne. V’là tout ce que je puis faire pour vous, père Brantôme, car qu’est-ce que ça me fait à moi que le droguet de la Malgaigne soit noir ou bleu sur sa carcasse ?… ou qu’elle… vous m’entendez…

Il siffla doucement : manière d’indiquer musicalement une chose délicate. Puis il montra son dos enfariné au père Brantôme et s’en alla, tricotant des hanches et chantonnant, son gros catogan battant la mesure entre ses deux épaules :


 
« La belle bourgeoise a passé trente ans,
« Votre serviteur très humble !
« Votre serviteur !
« Votre serviteur !
« Votre serviteur très humblement ! »


Seulement, il n’apprit rien de la grosse Eulalie. Aucune lettre n’était venue à l’adresse de la Malgaigne, qui ne savait pas lire et qui, de sa vie, n’en avait reçu, et les deux flâneurs, — pas plus que le reste de la contrée, — ne surent pourquoi la vieille Malgaigne ne portait plus que du noir sur elle et ne marchait plus que la cape de son mantelet rabattue par-dessus sa