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Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/77

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puisque aujourd’hui, sur la terre, son père coupable a demandé pardon à Dieu !

Et il la prit passionnément dans ses bras et la leva vers le portrait au sombre cadre d’ébène, et Calixte y suspendit la couronne de pensées qu’elle venait de tresser.

— Quand partez-vous ? — demanda timidement Néel.

— Mais ce soir, — répondit Sombreval. Quand un homme est décidé à faire une opération chirurgicale sur son âme, le plus tôt est le mieux ! L’Ange que voilà, ajouta-t-il en passant sa main de chimiste et de forgeron sur l’or des cheveux de son enfant, et en les lui lissant avec le mouvement idolâtre d’une mère, l’Ange que voilà, c’est la Force même sous l’image tremblante de la faiblesse. Je manquerais de force qu’elle m’en donnerait.

— Dieu est si bon pour moi, — dit-elle — que je dois bien souffrir encore cela pour lui !

— Vous voyez, monsieur, reprit Sombreval, si j’avais raison de compter sur elle. Mais j’ai aussi un peu compté sur vous. Voulez-vous me faire la conduite jusqu’à la Sangsurière, monsieur Néel ?

— Et même jusqu’à Coutances, si vous voulez de moi et si mademoiselle Calixte le désire ! — dit Néel, touché de cette amitié de Sombreval.