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Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/64

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homme, une peur que je n’aurais jamais dominée.

— Il ne parlait que de l’Enfer ! Il avait toujours l’Enfer à la bouche ! dit Agathe haletante, comme si elle eût voulu justifier la peur que le P. Riculf inspirait à la jeune fille. Jamais on n’a tant prêché sur l’Enfer. Il nous damnait toutes… J’ai connu un prêtre dans mon pays, il y a bien des années, qu’on appelait aux Augustines de Valognes le Père l’Amour, parce qu’il ne prêchait que l’amour de Dieu et le Paradis. Mais, Sainte-Agathe ! ce n’est pas le Père Riculf qu’on appellera jamais de ce nom-là !

— Allons ! taisez-vous ! fit madame de Ferjol, qui voulait que l’entretien cessât, parce qu’il offensait la charité. S’il rentrait, le Père Riculf, car je ne puis croire qu’il soit parti la veille de Pâques, il nous trouverait jasant de lui, ce qui n’est pas convenable. Tenez, Agathe, puisque vous dites qu’il n’y est pas, montez à sa chambre, vous trouverez peut-être son bréviaire oublié sur quelque meuble et qui vous dira qu’il n’est pas parti.

Et elles restèrent seules, la fille et la mère.