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Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/84

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n’étaient jamais sortis de cet anneau de montagnes, comme s’ils eussent été pris d’un charme étrange au centre de cette bague sombrement enchantée ! C’était de l’autre côté du versant intérieur de ces montagnes que passaient, traversant la France, dont le Forez est un des centres, des voyageurs, des mendiants et des rôdeurs de toute espèce, qui pouvaient être, pour une jeune fille, de mauvaises rencontres ; mais de ce côté-ci, il n’y avait que les gens de cette petite vallée, étroite, noire et humide comme un puits. D’ailleurs, ces dames de Ferjol étaient presque superstitieusement respectées. Lasthénie aurait pu nommer par leur nom tous les petits pâtres qui suspendaient leurs chèvres aux pâturages aériens de ces montagnes, toutes les vachères qui allaient traire, le soir, dans les près en pente, tous les pêcheurs de truites qui les prenaient au fil des cascatelles, et qui en rapportaient des paniers pleins, dont ils alimentaient la contrée, comme les pêcheurs de saumon en nourrissent l’Écosse. Madame de Ferjol n’était, du reste, jamais éloignée pour longtemps de sa fille. Elle la