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Page:Barrès - Les Déracinés.djvu/490

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CHAPITRE XX

À BOUTEILLER, LA LORRAINE RECONNAISSANTE

Dès cet été de 1885, on peut commencer, à calculer les conséquences du crime de Billancourt : elles continuent à se développer par retentissement à travers le monde. Couper le cou à Racadot, c’est de la prudence, mais nulle expiation ne peut faire qu’un acte n’ait pas été commis. Nous avons entendu des individus d’un même plan social apprécier diversement un même cas, dont nul d’ailleurs ne méconnaît l’atrocité. Mais le curieux, c’est moins les sentiments déterminés en chacun d’eux par cette crise que les rapports nouveaux qu’elle institua entre eux.

Bouteiller, préoccupé de se couvrir, disait :

— Ce misérable Racadot était un garçon d’intelligence pratique, nullement un théoricien. Il a tué pour assurer l’existence de son journal. L’idée de fonder la Vraie République a dû lui venir d’un nommé François Sturel, qui précisément en fut le directeur, esprit brillant, mais inquiet et sans discipline sociale. Quant aux divagations sur le « parasitisme » par lesquelles il a voulu donner du ton à son infamie, nul doute qu’il ne les tienne du jeune Rœmerspacher,