Page:Barre - Le Symbolisme, 1911.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
68
LE SYMBOLISME

beau du symbolisme, mais ils les jetaient au hasard, assez insconsciemment au début, pour le seul plaisir de clouer l’adversaire qu’une affirmation catégorique ne suffisait pas à persuader. Sur le conseil d’aînés qui connaissaient mieux les difficultés de la lutte, les jeunes se documentèrent sur leurs illustres origines ; ils apprirent à fortifier leur foi d’arguments précis ; ils firent provision d’armes pour les combats dialectiques de l’avenir ; ils s’aguerrirent en s’instruisant pour assurer le triomphe de leurs idées. En d’autres termes, il y avait aux environs de 1885 non seulement une atmosphère favorable à l’éclosion d’un art nouveau, mais encore des milieux spéciaux où les zélateurs de la nouvelle esthétique se suggestionnaient réciproquement et se cuirassaient d’idéal. C’étaient les cercles, les revues, les cénacles où se retrouvaient ceux qu’animaient des instincts pareils et où se développaient, comme en serres chaudes, les germes du symbolisme.

1. Le premier de ces cercles, celui d’ailleurs d’où sont sortis par division tous les autres, fut celui des Hydropathes. Il avait été créé par Émile Goudeau, le fondateur ou le collaborateur inlassable de toutes les associations de ce genre.

Au début, cette société n’était qu’une simple réunion d’amis, affligés de penchants communs pour l’art et la poésie, qui avaient trouvé plaisant de causer entre eux, après le repas du soir, dans la salle à manger de la pension où ils prenaient leur repas, un petit hôtel de la rue des Boulangers. Quelques-uns des pensionnaires, qu’intéressaient particulièrement la verve et l’esprit des interlocuteurs, avaient pris l’habitude d’assister à ces causeries. Par malheur, avaient surgi en nombre des Haïtiens qui, bientôt, avaient proposé des parties de baccara, ce qui n’avait pas tardé à provoquer une descente de police. Les amis s’étaient envolés au premier étage du Café de la Rive gauche, au coin de la rue Cujas et du boulevard Saint-Michel, où le propriétaire leur consentait