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Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/40

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Mais quand j’essayais de renouveler jusqu’à dix mes offres dérisoires, Mimi ne pouvait plus deviner le moment où cessait son supplice, et il s’élançait, avant le temps pour happer le morceau.

« Les expériences sur les chevaux sont encore plus curieuses.

« Dans des villages du gouvernement de Pskov, le docteur a observé un cheval de paysan, qui avait pris l’habitude de faire une halte, pendant qu’il labourait, après avoir tracé vingt sillons.

« Dans un autre village, dit-il, j’ai vu un cheval qui comptait les verstes d’après le nombre de poteaux et l’heure d’après les coups de l’horloge.

« Un jour, j’allais à Valdaï, lorsqu’à la vingt-deuxième verste, un des chevaux de la troïka s’arrêta tout à coup.

« Le postillon descendit de son siège, donna de l’avoine au cheval, et l’on se remit en route. Tout jeune, ce cheval aurait été habitué par son maître à recevoir une poignée d’avoine toutes les vingt-cinq verstes, et le cheval comptait les verstes d’après le nombre de poteaux. Cette fois-ci le cheval s’était trompé de trois verstes, mais ce n’était pas sa faute. Il comptait les verstes par le nombre de poteaux et non d’après la fatigue, et, cette fois, il avait pris pour des poteaux kilométriques trois poteaux qui leur ressemblaient beaucoup, et, qui servaient à marquer la limite des bois de l’État. C’est ainsi que le cheval s’était trompé de trois verstes.

« Ce même cheval s’était habitué à recevoir sa nourriture dans l’écurie dès que l’horloge voisine sonnait minuit. J’ai pu constater moi-même qu’à chaque coup de l’horloge, le cheval dressait l’oreille et écoutait : il baissait la tête d’un air mécontent lorsque l’horloge frappait moins de douze coups, puis, il manifestait clairement sa satisfaction lorsqu’enfin les douze coups annonçaient l’heure du repas. »