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Page:Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 1.djvu/485

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LE CYGNE,


OU


LE RETOUR DE JEAN LE CONQUÉRANT.
______


ARGUMENT.


Charles de Blois avait péri à la bataille d’Auray (1564), et Jean de Montfort, son rival, était resté maître de la Bretagne. Mais l’amour de Jean pour les étrangers qui l’avaient aidé à la conquérir, l’accueil qu’il leur fit à sa cour, les faveurs dont il les combla au préjudice des hommes nés sur le sol breton, ne tardèrent pas à soulever les passions nationales : mis en demeure par ses barons ou de chasser les Anglais de la Bretagne, ou de quitter lui-même le pays, il choisit le dernier parti, et se retira en Angleterre. Charles V crut voir dans la conduite des barons révoltés une preuve de sympathie pour la France, et voulut en profiter pour changer en pouvoir direct le droit de suzeraineté qu’il s’arrogeait sur la Bretagne. Il fit donc déclarer le pays réuni à la couronne de France, et y envoya une armée pour faire exécuter l’arrêt de confiscation. Le roi s’était attendu à n’éprouver aucune résistance des Bretons : il connaissait mal cette race, toujours rebelle au joug des conquérants[1], comme s’exprime un vieil auteur. « Se croyant déjà maître de la Bretagne, dit un poëte contemporain, il avait mis sur pied d’élégantes compagnies toutes fraîches de gentils Français bien polis, qui se réjouissaient à l’idée de voir les Bretons venir d’eux-mêmes se soumettre. Il pensait avoir sans débat la Bretagne et ses habitants, pour les tondre comme des moutons. Ils avaient souffert tant de maux en défendant la France contre la servitude anglaise ! ils étaient si défigurés, si balafrés, si mutilés ! Les uns étaient devenus borgnes, les autres estropiés ; la

  1. Semper contumax regibus (cité par d’Argentré, Histoire de Bretagne, p. 87).