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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 1.djvu/88

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journal de ma vie

don Cesar d’Este[1] destenoit contre tout droit ; que cette guerre n’estoit pas moins juste, et sainte, que celle de Hongrie, et estoit sy prochaine que dans huit jours nous serions aux mains avesques les ennemis, la ou, quand nous irions en Hongrie, les armées ne se mettroint en campagne de plus de quattre mois. Ces persuasions prevalurent sur nos esprits, et conclumes que le lendemain nous irions à Forli offrir tous ensemble nostre service au cardinal Aldobrandin[2], legat de l’armée, et que je porterois la parole au nom de tous ; et l’executay au mieux que je peus. Mais le legat nous receut sy maigrement, et nous fit sy peu de bon accueil, que le soir, à la giste, nous ne pouvions assés tesmoygner le ressentiment, et la colere que nous avions de son mespris. Allors feu mon frere commença a dire que veritablement nous avions eu ce que nous meritions ; que, n’estans point sujets du pape, ny obligés à cette guerre, nous nous estions allé inconsiderement offrir d’assaillir un prince de la maison d’Este, a quy la France avoit tant d’obligation, quy avoint tous esté sy courtois aux estrangers,

  1. César d’Este, fils d’Alphonse d’Este, marquis de Montecchio, et de Julie de la Rovere, et petit-fils d’Alphonse Ier et de Laure Eustochie. Le Pape revendiquait le duché de Ferrare comme dévolu au Saint-Siège par l’extinction de la ligne légitime d’Este. Don César qui s’était fait proclamer à Ferrare le 29 octobre 1597, renonça à ce duché par la capitulation du 13 janvier 1598, et demeura seulement duc de Modène et de Reggio.
  2. Pierre Aldobrandini, neveu du pape, diacre cardinal de la promotion de 1593, puis archevêque de Ravenne et évêque de Sabine, mort en 1621. — Les anciennes éditions l’appelaient Alamanni.