Aller au contenu

Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/243

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
239
1626. mars.

m’asseurasse qu’il n’y avoit aucune imagination de traitté, et que c’estoint des fourbes espagnoles de faire courir ces faux bruits pour nous mettre en jalousie avec nos alliés, dont je les pouvois asseurer ; ce que j’estois resolu de faire, et d’aller le lendemain visiter le Contarin pour luy mettre sur cette affaire l’esprit en repos. Je vis le soir mesme Mr le prince de Piemont auquel je dis l'apprehension de l’ambassadeur Contarin, laquelle j’avois fait sçavoir a Mr le cardinal de Richelieu, et la response qu'il m’avoit faite. Monsieur le prince me respondit que les Venitiens estoint gens speculatifs et soupçonneux quy debitoint leurs songes et leurs imaginations pour bonnes nouvelles, et qu’ils m’avoint présenté celle là plustost par prevention que par aucune connoissance qu’ils en eussent ; que pour luy il estoit tres asseuré qu’il ne se traittoit rien au prejudice de la ligue, ny de nos presens projets.

Sur cela j’allay cheux la reine ou je trouvay Mr le mareschal de Crequy, et sur les neuf heures du soir le roy nous envoya querir tous deux pour le venir trouver au cabinet de la reine mere ou il estoit avec elle, Mr de Chomberg et Mr de Harbaut[1]. Il nous commanda de nous asseoir en conseil, et nous desclara comme il venoit de recevoir ce traitté fait a son insceu par son ambassadeur du Fargis, dont il nous fit faire lecture par Mr de Harbaut. Nous le trouvasmes sy mal conceu, sy mal projetté et raysonné, sy honteux pour

  1. Raymond Phelipeaux, seigneur d’Herbault, frère aîné de Paul Phelipeaux, seigneur de Pontchartrain, était secrétaire d’État, et partageait avec Potier d’Ocquerre et Loménie de la Ville-aux-Clercs le département des affaires étrangères. Il mourut le 2 mai 1629.