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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/283

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1626. décembre.

J’allay prendre congé de la reine, quy me donna un beau diamant. Je pris en suitte congé des dames de la chambre du lit ; puis j’allay cheux le comte de Carlile quy s’estoit fort blessé a la teste le soir auparavant. Puis je vins a la chambre du duc ou je demeuray assés longtemps pour attendre mes despesches et les lettres que le roy m’avoit promises pour abolir les poursuivans d’Angleterre[1]. Finalement je pris congé du duc et des autres seigneurs de la court, et seulement accompagné de Lucnar et du chevalier de Jars, ayant envoyé mes gens devant, je me mis dans un carrosse de la reine, et vins coucher a Gravesinde ; le jeudy 3me a Sittimborne, puis a Cantorberi, et le samedy 5me j’arrivai a Douvre avec un equipage de quattre cens personnes quy passoint avec moy, compris soissante et dix prestres que j’avois delivrés des prisons d’Angleterre.

Je voulus deffrayer tous ceux quy repassoint avesques moy en France, croyant que, le mesme jour que j’arriverois a Douvre, je me pourrois embarquer : mais la tempeste me retint quatorse jours a Douvre, ce quy me cousta quattre mille escus.

J'arrivay a Douvre pour disner, et fis embarquer tout mon esquipage, pensant passer la mer. Mais elle nous fut contraire le dimanche, le lundy, et le mardy, que le duc m’envoya Montagu pour m’avertir que c’estoit luy que le roy envoyoit en France, que je luy desconseillay tellement que je luy fis entendre que l’on

  1. Les poursuivants (pursuivants) étaient des commissaires délégués par les magistrats ou par les évêques pour rechercher et poursuivre les catholiques, et particulièrement les prêtres : ils se livraient à toutes sortes d’exactions et de violences.