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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/352

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journal de ma vie.

estoint entrés par leurs quartiers ; et avec un nommé Croysille que le roy envoya avec eux, ils monterent a cheval, et il leur en montra la piste.

Sur ces entrefaites j’estois venu au fort de Lafons quy estoit desja en deffense : Mr du Hallier, Marcheville[1], La Courbe, don Augustin Fiesque, et d’autres estoint avec moy. Nous vismes sortir vingt cinq cavaliers armés de la porte de Coygnes. Je fis prendre cinquante mousquetaires a Mr du Hallíer, et huit de mes gardes avec quelques volontaires, pour les aller faire rentrer en leur taniere. Il partit donc, et moy je le suyvis comme les mousquetaires sortoint du fort, et voyant qu’il s’avançoit par trop dans la rue du faubourg de Lafons vers les ennemis, je courus a luy pour le faire arrester. Mais comme nous y estions, nous rencontrames en un destour de rue ces ennemis a douse pas de nous, ce quy nous fit faire ferme, parce que nous n’estions que dix chevaux et ces huit gardes, et qu'ils estoint tous armés de toutes pieces. Eux aussy en mesme temps firent halte, et La Courbe leur cria : « Messieurs, il y fait bon, vous n’aurés pas toujours deux cordons bleus en sy belle prise. » En mesme temps un de mes gardes tira de sa carabine ; et eux, croyans a nostre contenance que nous estions suyvís, se retirerent, et lors nous les poursuyvismes, voyant leur espouvante, et les fismes jetter dans leur contrescarpe ou ils furent soustenus de deux cens mousquetaires sortis de la ville quy commencerent a escarmoucher avec ces cinquante hommes sortis du fort, et j’en

  1. Henri de Gournay, seigneur de Marcheville en Lorraine, fut ambassadeur en Turquie.