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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/407

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1628. octobre.

garde ayant fait plusieurs bordées pour prendre le vent vint en fin sur les sept heures et demie a la portée du canon de nostre flotte et des deux pointes, puis tournant le bord tirerent tous les canons de la bande, et puis ayant tourné en firent de mesme de l’autre bande, ce que chasque vaisseau ayant fait il montroit la poupe et viroit en arriere, d’ou il estoit party, et en suitte apres que l’avant garde eut fait son salve, leur battaille et leur arriere garde en firent de mesme, et retournerent trois fois en cette mesme sorte. Nous ne nous endormions pas cependant de nostre costé : car outre que nostre armée navale les canonnoit incessamment, j’avois quarante pieces de canon sur Chef de Bois quy faisoint une belle musique, lesquels furent fort bien executés. Du costé de Coreilles il y en avoit vingt et cinq quy firent aussy tres bien leur devoir pendant deux heures et demie que cette feste dura, en laquelle il fut tiré de part et d’autre pour le moins cinq mille coups de canon. Le roy estoit en la batterie de Chef de Bois ou passerent par dessus sa teste plus de trois cens canonnades quy allerent encores a plus de trois cens pas de là. Comme la mer se retira, aussy firent les ennemis, quy fut environ les dix heures, et nous puis apres avec certaine asseurance que les Anglois ne nous feroint aucun mal ny a nostre flotte quy estoit fort animée a les bien recevoir. Les ennemis jetterent encor de ces artifices de feu quy vont nageant dans l’eau, qu’ils appellent mine volante, sans aucun fruit, non plus que d’un vaisseau plein de feux d’artifice qu’ils croyoint devoir faire merveille, quy se consuma avant que d’arriver pres de nostre flotte.