Aller au contenu

Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/87

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
83
1622. juin.

devoint envoyer huit canons pour l’attaquer, et que le roy vouloit faire servir d’exemple rigoureux cette meschante ville. Ils commencerent a me dire que je pouvois abreger le temps, et que peut estre sy je leur faisois parler, qu’ils se mettroint a la rayson ; que sy je leur voulois permettre, un d’eux les iroit trouver, et qu’ils se promettoint qu’il me rapporteroit tout contentement. Je leur respondis qu’un capitaine n’acqueroit point de gloire ny de reputation par la reddition des villes avant qu’elles soint attaquées, sy faisoit bien par la destruction, et que j’avois plus a desirer de la prendre par force que par anticipée composition ; neammoins mon humeur quy n’estoit point portée a la cruauté, convenoit avec leur desir, et me faisoit leur asseurer que sy dans deux heures celuy quy leur iroit parler me rapportoit une entiere obeissance, se remettans a la capitulation que je leur voulois faire de la part du roy, je leur asseurois qu’elle seroit favorable ; et que pour les mettre davantage a leur tort, je trouvois bon qu’un d’eux s’y acheminat. Ils desputerent a l’heure mesme un vieux gentilhomme voysin de là, pour leur aller tesmoygner ma bonne volonté, et les persuader d’embrasser cette occasion quy seule pouvoit destourner leur entiere ruine, comme ceux de Negrepelisse et de Saint Antonin se l’estoint attirée par leur opiniatreté. Je ne discontinuay cependant aucune chose de ce quy appartenoit au siege, et hormis Mr de Valançay, tous ceux de l’armée croyoint que je m’y voulois opiniatrer. Ce gentilhomme revint avant le temps que je luy avois prescrit, rammenant trois desputés de Carmain quy m’offrirent d’abbord de se tenir en neutralité tant que cette guerre dureroit.