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Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 4, 1922.djvu/352

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ROSINE, (éclatant en sanglots et lui jetant les bras autour du cou.)

Poliche ! Mon bon Poliche !

POLICHE.

Ah ! je le réentends donc enfin, ce nom chéri !… Didier, c’était vilain… Pleure, mon pauvre chou !… C’est si difficile, l’amour, va !… Pleurons ensemble, si tu veux. Savourons-la, cette mélancolie d’être nous… tout simplement, de n’être que nous, ma chérie, comme nous sommes ! Tout ça est si injuste, si ridicule, si en dehors de nous… Ah ! on ne fait pas ce qu’on veut dans la vie…

(Ils pleurent tous les deux. Le grand feu de bois, clair, illumine la pièce… et fait des ombres et des lumières bougeantes.)
ROSINE.

Laisse-moi comme ça sur ton épaule… Crois-tu, hein ?

POLICHE.

Hé oui !… Que veux-tu !… Ce n’est pas plus ta faute que la mienne… Il y a des amours nés sincères et d’autres faux… Le nôtre était né affreusement faux. L’accordeur, en le mettant au point, l’a cassé. Il a suffi d’une seconde, d’un mot, crac ! Mais cela aura eu du bon, tout de même… Car je n’aurais jamais connu, sans cela, cette minute-ci dont je me souviendrai toute ma vie !… cette minute pendant laquelle j’aurai entendu palpiter ton cœur contre le mien… si pauvrement, si vraiment… (Il lui écarte les cheveux sur le front.) Il faut que tu deviennes heureuse… Si tu savais, je