Aller au contenu

Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/319

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bitude. Et c’est peut-être là mon plus grand tort !… Oui, car à force de te faire écouter, tu as cru que tu pourrais disposer entièrement de moi. Aujourd’hui, tu te heurtes à mon refus, et t’en voilà mortifiée, irritée.

HENRIETTE.

Oh ! m’obéir, n’exagère pas !… Si tu m’avais seulement écoutée dans certaines circonstances… Je n’ai jamais eu tant d’influence sur toi…

HONORINE.

Je ne t’obéis pas en tout ?… C’est-à-dire que je t’obéis automatiquement dans le traintrain de la vie sans même y réfléchir. Il m’arrive de ne pas pouvoir me commander une robe sans toi, parce que je me dis intérieurement : « Si tu choisis cette ceinture vert billard… oh ! je la vois d’ici, elle va te dire d’un petit air pincé : C’est pour faire quoi ? Un coussin, une ombrelle, un abat-jour ? »…

HENRIETTE.

Je crois que tu exagères beaucoup mon intervention.

HONORINE.

Non ? Ça n’est pas vrai ? Que tu sois mon professeur de maintien, passe encore, que tu rectifies tout haut quand je demande de l’eau de seltz : « On dit un soda », je ne m’en formalise pas… Ce n’est rien. Mais il y a des cas tout de même ! Tiens, au restaurant de la Cascade, ces jours-ci, quand nous avons été prendre le thé, c’est toi qui as payé… Oh ! le plus naturellement du monde. Ton élève, je te le répète, passe, mais avoir l’air de ta gouvernante, ça non ! Tout de même, mon bichon, ça devient à mourir de rire !…