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Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/327

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pouser, au moins le seul que je connaisse ! Il y en a peut-être d’autres !… enfin, ils me laissent le choix du parti, pourvu qu’ils réunissent toutes les conditions ! C’est encore bien aimable à eux !

HENRIETTE.

Mais je t’assure que…

HONORINE.

Non, ne discutons pas ! C’est insoutenable… Tu m’as donné le seul argument qui puisse me toucher… ta douleur… Si nous étions des êtres de roman, ce serait facile de satisfaire tout le monde. La mère se sacrifie, les deux cortèges, la noce… Je vois ça !… Par malheur, nous sommes dans la vie, il y a une suite à la dernière page du dénouement. Cette suite, c’est vingt à vingt-cinq ans de vie conjugale, sans amour… Merci ! Je ne suis pas assez vieille pour des négociations de ce genre. J’ai encore quelques belles années devant moi. Toi mariée, je ne disposerai pas mal de ma liberté, sois tranquille… ta mère n’offensera jamais sa fille, même dans ses amitiés les plus proches… Mais je jouirai de la vie, je voyagerai, je me ferai une existence remplie d’art et de camaraderie… Que veux-tu, c’est égoïste de ma part, mais dis-toi bien aussi que Nono était née une sincère, une amoureuse… Maintenant qu’elle a passé l’âge de l’amour, elle ne demande pas mieux que d’y renoncer à tout jamais, mais précisément qu’on n’exige pas d’elle, même par esprit d’abnégation, qu’elle prostitue ses vieux jours.

HENRIETTE.

Oh ! ce mot, ce mot ! vraiment !

HONORINE.

Tais-toi… J’arrête sur tes lèvres une réflexion