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Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 9, 1922.djvu/128

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soirée, ces arbres, ce jardin. Je devine obscurément une terreur… Mais je sens monter en moi, près de vous, toute l’émotion du soir où j’ai souhaité de disparaître à cause d’elle… Voyez-vous, c’est le même ciel immobile… Il n’y a qu’une chose qui est peut-être changée… le visage de ma douleur… Et un peu grâce à vous, n’est-ce pas ? Comprenez-vous ma dette superstitieuse, maintenant ? et pourquoi j’ai tenu à l’acquitter ?

BOUGUET.

Il faut que je vous embrasse… il faut que nous nous embrassions !…

HERNERT.

De tout mon cœur !

(Et ces deux hommes, dans l’ombre, se donnent un baiser maladroit où se mêlent des larmes et de larges respirations oppressées.)
BOUGUET.

Mon ami, mon cher ami ! qui pourrait comprendre notre émotion en ce moment et le baiser d’homme que nous venons d’échanger ?

HERNERT, (radieux.)

Vous voyez que j’ai bien fait de venir ce soir. Je ne m’attendais pas à un pareil moment.

BOUGUET.

Quelqu’un vient nous le voler.

HERNERT.

Et, voyez, c’est un peu comme dans des histoires et comme à la fin des rêves, la musique cesse avec nos paroles.