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Page:Bauclas - Le Mort s’est trompé d’étage, 1946.pdf/95

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le mort s’est trompé d’étage

LE MORT S’EST TROMPÉ D’ÉTAGE 93 « Ne fait-elle pas ici un peu figure de Cen- drillon, la fille de la première femme ? » songeait Lucien. Tu sais qu’Évelyne est une excellente musi- cienne, dit Raoul, comme s’il avait voulu protester contre les pensées de son cousin. Premier prix de piano du Conservatoire de Bordeaux. Tu devrais nous jouer quelque chose, petite. Sans faire de façons, Évelyne s’approcha du piano, repoussa en arrière ses boucles pâles et demanda en regardant Lucien : Que faut-il jouer ? Mais… la Fille aux cheveux de lin, naturelle- ment, dit-il en souriant. Elle lui jeta un vif regard étonné et lui répondit par un sourire charmant qui illumina son visage, et, d’un peu terne et morose qu’elle avait paru jusqu’alors, se montra gaie et spirituelle. Puis elle se mit à jouer. Il écoutait, les yeux mi-clos. Elle jouait très bien, avec un toucher délicat, velouté, et surtout une poignante sensibilité. Enveloppé de charme, il ne bougeait plus. Soudain, ce fut comme un appel qui lui fit lever les yeux. Ceux de la pianiste étaient fixés sur lui avec une expression était-ce possible ? d’an- goisse, de terreur même. Il dut laisser voir sa stu- peur, car elle se ressaisit, secoua la tête comme pour en chasser une idée odieusement importune et se força à sourire. De leur fauteuil, les autres. n’avaient rien vu de cette scène muette. Venez, Denise, vous allez chanter et je vous accompagnerai. Denise avait une jolie voix et chanta délicieuse- - - -