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JOLIS PÉCHÉS

mon prénom, on m’appelait Mariquita, mot caressant très commun dans les Espagnes, et que mes parents me donnèrent dans leur premier élan de tendresse. Je passerai rapidement sur les premières années de mon enfance ; je dirai seulement, à ma honte, que si mon âme était pure, mes sentiments sages, mes sens se livraient déjà une guerre intestine dont le péché d’Onan ne triomphait qu’à peine ; ma faible intelligence se rendait difficilement compte de cette lutte singulière entre les bons principes et les premières sensations de la volupté ; je faisais d’ailleurs tout au monde pour n’être sensible qu’à la voix de mes devoirs…

Enfin, parvenue à cet âge périlleux où la pudeur reçoit pour la première fois les rosées de la nubilité, où le trône de la volupté s’enveloppe en quelque sorte dans la pourpre, comme pour prouver sa haute vocation et son règne absolu sur les hommes, je sentis soudain en même temps une révolution en moi qui me révéla le secret de mes galants destins. Mon sein commençait déjà aussi à prendre les plus heureux contours ; les roses et les lis avaient succédé à deux lentilles insignifiantes ; deux boules de neige éclatantes de blancheur faisaient soulever mon corset tous les jours plus étroit ; mes formes rebondies excitaient de toutes parts les désirs : mes mains étaient blanches comme l’albâtre, mes cheveux, mes yeux couleur