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Page:Baudoin - Jolis péchés des nymphes du Palais-Royal, 1882.djvu/65

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JOLIS PÉCHÉS DES NYMPHES

Ici, il n’y eut qu’un cri dans l’assemblée pour réprimer l’insolence de Clémentine, qui osait insulter à la beauté malheureuse dans la personne des demoiselles de la galerie, sans songer que les coups de l’adversité et la perfidie des hommes avaient conduit la plupart d’entre elles à fléchir un front virginal sous le joug de la nécessité. Clémentine, s’empressant de se justifier, assura que son intention n’avait été de blesser personne, et qu’elle avait voulu parler ici en thèse générale ; puis, changeant de sujet :

— Je suis fille d’un honnête tapissier de Versailles, dit-elle, qui longtemps m’enseigna à faire des tours de lit ; de là je passai chez une lingère, où l’on m’apprit à faire des corsets à suppléants, ainsi que des corps d’enfants. Un officier de hussards me trouvant de son goût me séduisit, m’enleva et m’abandonna, suivant l’usage : je passerai rapidement sur tous les amants qui le remplacèrent, cela nous conduirait trop loin, j’arriverai de suite à ce singulier point de mon histoire, où, vivant avec un employé de l’armée, je l’accompagnai jusqu’à Mayence. L’or ne manquait pas ; aussi un parfait bonheur présidait à notre union ; longtemps j’avais passé pour sa sœur dans les diligences ; une fois à Mayence, nous jugeâmes ne devoir faire qu’un saut de la fraternité à l’hyménée, et partie de Metz comme la sœur de Saint-Firmin, c’était le nom de mon aimable frère postiche, je descendis à Mayence