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Page:Baudry - Rue Principale 1 les Lortie, 1940.djvu/120

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RUE PRINCIPALE

essayé, et je sais mieux que personne qu’il ne m’a jamais pardonné de ne pas être arrivé à ses fins. J’ai la conviction que Sénécal ne s’est pas trompé : je suis sûre qu’il savait très bien, en accusant Marcel, que ce n’est pas par lui qu’il a été dévalisé.

Bernard parut réfléchir quelques instants.

— Évidemment, dit-il, c’est une autre hypothèse. Mais vous pouvez vous tromper.

一 Je ne le pense pas. Si je me trompais, si Sénécal était vraiment de bonne foi, il ne s’acharnerait pas comme il s’acharne. Il ne passerait pas son temps à courir la ville pour crier à tout le monde son indignation de voir son voleur en liberté. Mais pour en revenir à Marcel, vous seul avez maintenant suffisamment d’influence sur lui pour le convaincre qu’il ne faut pas qu’il se sauve.

— Je vous promets d’essayer, Ninette, mais je doute que cela suffise.

— Vous croyez qu’il partira quand même ?

— Ce n’est pas ce que je veux dire. Pour vous, et peut-être parce que je réussirai à le convaincre qu’en se sauvant il commettrait une petite lâcheté, Marcel restera, j’en suis sûr. Oui il restera, mais tant que nous n’aurons pas réussi à lui rendre l’estime, l’amitié de ceux au milieu desquels il a grandi, de tous ceux qui, avant les malheureux événements de ces derniers temps, étaient contents de se dire ses amis, il ne sera jamais heureux.

— Je sais, monsieur Bernard, mais que pouvons-nous faire ?

— Pour convaincre les gens de l’innocence de quelqu’un, Ninette, il n’y a vraiment qu’un moyen qui soit radical : c’est de leur fournir le véritable coupable.

— Il doit être loin celui-là !

— Pas si loin peut-être qu’on ne puisse aller l’y chercher.