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Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique (1820) - Tome 1.djvu/244

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ADAM.

de Pexodare nommée Ada, se crut possesseur légitime du royaume de Carie. Jusque-là donc M. de Valois me semble très-bien fondé ; mais il n’a pas eu raison de dire que Philippe rechercha cette alliance pour Aridée son frère ; ce fut Pexodare qui la rechercha, et qui envoya pour cet effet un ambassadeur à Philippe. D’autre côté, Aridée n’était point le frère, mais le fils de Philippe. Plutarque le dit expressément. Il ajoute une chose qu’il n’est pas inutile de savoir pour mieux connaître les obliquités des cours. Les amis d’Alexandre l’alarmèrent sur les propositions de l’ambassadeur de Pexodare : ils lui mirent dans la tête que Philippe ne voulait avancer Aridée par un gros mariage qu’afin de le mettre plus en état de succéder au royaume. Alexandre, pour rompre ce coup, dépêcha un homme à Pexodare, afin de lui représenter qu’il devait plutôt jeter les yeux sur Alexandre que sur Aridée, qui était bâtard et presque fou. Pexodare ne balança point sur le choix ; mais Philippe ayant eu vent de ce manège censura vivement Alexandre, et lui dit qu’il serait bien lâche et bien indigne de lui succéder s’il se contentait de la fille d’un Carien, vassal d’un prince barbare. En même temps il exila tous les confidens de son fils, et écrivit aux Corinthiens de lui envoyer pieds et poings liés l’homme qu’Alexandre avait dépêché en Carie. C’était un comédien nommé Thessalus.

ADAM[* 1], tige et père de tout le genre humain, fut produit immédiatement de Dieu, le sixième jour de la création. Son corps ayant été formé de la poudre de la terre (A), Dieu lui souffla aux narines respiration de vie, c’est-à-dire qu’il l’anima et qu’il en fit ce composé qu’on appelle homme, qui comprend un corps organisé et une âme raisonnable. Le même Dieu qui avait produit Adam le plaça dans un beau jardin [a], et pour le mettre en état d’imposer un nom aux animaux, il les fit venir vers lui, puis il fit tomber sur lui un profond sommeil et lui ôta une côte (B), de laquelle il forma une femme. Adam reconnut que cette femme était os de ses os, et chair de sa chair, et vécut avec elle sans qu’ils eussent honte de se voir nus. Il y avait dans le jardin un arbre dont Dieu leur avait défendu de manger, à peine de la vie. Cependant la femme, séduite par un serpent[b], ne laissa pas d’en manger, et de persuader à Adam d’en manger aussi. Dès lors ils s’aperçurent qu’ils étaient nus (C), et se firent des ceintures avec des feuilles de figuier cousues ensemble. Dieu vint leur prononcer la peine dont il voulait punir leur crime, les chassa du jardin, et leur fit des habits de peau. Adam donna le nom d’Ève à sa femme, et consomma son mariage. Il devint père de Caïn et d’Abel, et puis de Seth, et de plusieurs autres fils et filles dont on ne sait pas le nom, et il mourut à l’âge de neuf cent trente ans[c]. Voilà tout ce que nous savons de certain sur son chapitre. Une infinité d’autres choses que l’on a dites de lui sont ou très-fausses ou très-incertaines : il est vrai qu’on peut juger de quelques-unes qu’elles ne sont point contraires à l’analogie de la foi, ni à la probabilité. Je mets en ce der-

  1. * Joly approuve le texte de cet article ; mais il en blâme les remarques.

    Chauſepié indique les légendes orientales comme contenant un grand nombre de circonstances fabuleuses dont il rapporte les plus singulières.

  1. On l’appelle ordinairement le Paradis terrestre et le jardin d’Eden.
  2. Touchant ce serpent, voyez les remarques de l’article Ève.
  3. Voyez les cinq premiers chapitres de la Genèse.