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Page:Beauchesne - À M. Victor Hugo, Béthune.djvu/3

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Rien ne doit détourner sa mission féconde
Qui va plus loin que l’échafaut.

La lyre est une épée ardente et magnifique
Que la mort ne fait point rentrer dans le fourreau ;
Et Chénier vers le ciel, avec sa lyre antique,
S’envolait des mains du bourreau !

Prends garde ! — Car le Dieu que ta bouche renie,
Le Dieu qui t’a marqué de son doigt sur le front,
Un jour demandera compte de ton génie,
Et tes œuvres lui répondront.

Tu pleureras alors de mêler tes paroles
À cette fête impie, et d’applaudir au jeu
De ces vils histrions, qui, vingt ans, dans leurs rôles,
Ont raillé les hommes et Dieu.

Au culte de sa mère il faut qu’un fils réponde.
Ta mère a vu le jour au bord des océans,
Chez ces vieux vendéens que le vainqueur du monde
Nommait un peuple de géants.

Je t’en supplie au nom de ta mère chérie,
Reviens, reviens à ceux qui souffrent, ô Victor !
Sur les membres saignants de la vieille patrie,
Viens jeter ton écharpe d’or !

Donne-moi cette joie avant ma dernière heure.
Reviens, la nuit est sombre, et grand est le péril ;
Songe à l’enfant qui prie, à la mère qui pleure,
À ceux qui pleurent dans l’exil !