Page:Beckford - Vathek, éd. Mallarmé, 1893.djvu/167

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quelques autres amants infortunés de ces siècles antiques, les larmes baignaient les yeux de ses auditeurs. Ses vers (car, comme Meignoun, il était poète) inspiraient une langueur et une mollesse bien dangereuses pour les femmes. Toutes l’aimaient à la folie ; et, quoiqu’il eût treize ans, on n’avait pas encore pu l’arracher du harem. Sa danse était légère comme celle de ces duvets que font voltiger dans l’air les zéphirs du printemps. Mais ses bras qui s’entrelaçaient si gracieusement avec ceux des jeunes filles lorsqu’il dansait, ne pouvaient pas lancer les dards à la chasse, ni dompter les chevaux fougueux que son oncle nourrissait dans ses pâturages. Il tirait pourtant de l’arc d’une main sûre, et il aurait devancé tous les jeunes gens à la course, si on avait osé rompre les liens de soie qui l’attachaient à Nouronihar.

Les deux frères avaient mutuellement engagé leurs enfants l’un à l’autre, et Nouronihar aimait son cousin encore plus que ses propres yeux, tout beaux qu’ils étaient.