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Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/134

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VATHEK,

l’extrémité de leurs jours, prièrent alors humblement Carathis de les enterrer, puisqu’elle en avoit la commodité, & rendirent l’ame. Nerkès & Cafour plaisantèrent à leur manière sur la sottise de ces gens, trouvèrent l’aspect du cimetière fort à leur gré, & les sépulcres bien réjouissans ; il y en avoit au moins deux mille sur la pente d’une colline. Carathis, trop occupée de ses grandes vues pour s’arrêter à ce spectacle, quelque charmant qu’il fût à ses yeux, s’avisa de tirer parti de sa situation. Assurément, se disoit-elle, un si beau cimetière est hanté par les Goules ; cette espèce ne manque pas d’intelligence ; comme j’ai laissé mourir mes bêtes de guides faute d’attention, je demanderai mon chemin aux Goules, & pour les amorcer, je les inviterai à se régaler de ces corps frais. Après ce sage monologue, elle parla des doigts à Nerkès & à Cafour, leur disant d’aller frapper aux tombeaux, & d’y faire entendre leur joli ramage.

Les négresses, toutes joyeuses de cet ordre, & qui se promettoient beaucoup de plaisir dans la compagnie des Goules, partirent avec un air de conquête, & se mirent à faire toc, toc, contre les sépulcres. À mesure qu’elles frappoient, on entendoit un bruit sourd dans la terre, les sables