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Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/154

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VATHEK,

clair de la lune jusqu’à la vue de deux rochers élancés, qui formoient comme un portail à l’entrée du vallon dont l’extrémite étoit terminée par les vastes ruines d’Istakhar. Presqu’au sommet de la montagne, on découvroit la façade de plusieurs sépulcres de Rois, dont les ombres de la nuit augmentoient l’horreur. On passa par deux bourgades presque entiérement désertes. Il n’y restoit plus que deux ou trois foibles vieillards, qui, en voyant les chevaux & les litières, se mirent à genoux, en s’écriant : Ciel ! est-ce encore de ces fantômes qui nous tourmentent depuis six mois ? Hélas ! nos gens effrayés de ces étranges apparitions & du bruit qu’on entend sous les montagnes, nous ont abandonnés à la merci des esprits malfaisans ! Ces plaintes sembloient de mauvais augure au Calife ; il fit passer ses chevaux sur les corps des pauvres vieillards, & arriva enfin au pied de la grande terrasse de marbre noir. Là, il descendit de sa litière avec Nouronihar. Le cœur palpitant & portant des regards égarés sur tous les objets, ils attendirent avec un tressaillement involontaire, l’arrivée du Giaour ; mais rien ne l’annonçoit encore. Un silence funèbre régnoit dans les airs & sur la montagne. La lune réfléchissoit sur la grande plate-forme l’ombre