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Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/87

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CONTE ARABE.

Bababalouk répondit galamment : « Délices de mes prunelles, j’accepte la proposition qui découle de vos lèvres sucrées ; &, à dire vrai, mes sens sont affoiblis par l’admiration que m’a causé la splendeur rayonnante de vos charmes ». Reposez-vous donc, reprit la belle, en le plaçant sur le prétendu sopha. Tout-à-coup, la machine partit comme un éclair. Toutes les femmes voyant alors de quoi il s’agissoit, sortirent nues du bain, & se mirent sollement à donner le branle à l’escarpolette. Dans peu elle parcourut tout l’espace d’un dôme fort élevé, & faisoit perdre la respiration à l’infortuné Bababalouk. Quelquefois il rasoit l’eau, & quelquefois il alloit donner du nez contre les vitres ; en vain, il remplissoit l’air de ses cris avec une voix qui ressembloit au fon d’un pot cassé, les éclats de rire ne permettoient pas de les entendre.

Nouronihar, ivre de jeunesse & de gaieté, étoit bien accoutumée aux eunuques des harems ordinaires ; mais elle n’en avoit jamais vu d’aussi dégoûtant ni d’aussi royal : aussi se divertissoit-elle plus que toutes les autres. Enfin, elle se mit à parodier des vers Persans, & chanta : « Douce & blanche colombe qui vole dans les airs, donne quelque œillade à ta fidèle compagne.