Aller au contenu

Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/90

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
82
VATHEK,

Ces mots ne firent pas d'abord une grande impression sur le Calife ; mais il s'en ressouvint dans la suite.

Au milieu de cette conversation arriva Fakreddin, pour inviter Vathek à des prières solemnelles, & aux ablutions qui se faisoient dans une vaste prairie, arrosée par une infinité de ruisseaux. Le Calife trouva l'eau fraîche, mais les prières ennuyeuses à la mort. Il se divertissoit pourtant de la multitude de calenders, de santons & de derviches, qui alloient & venoient dans la prairie. Les bramanes, les faquirs & autres cagots venus des grandes Indes, & qui en voyageant s'étoient arrêtés chez l'Emir, l'amusoient sur-tout beaucoup. Ils avoient tous quelque momerie favorite : les uns traînoient une grande chaîne ; les autres un ourang-outang ; d'autres étoient armés de disciplines ; tous réussissoient à merveille dans leurs différens exercices. On en voyoit qui grimpoient sur les arbres, tenoient un pied en l'air, se balançoient sur un petit feu, & se donnoient des nazardes sans pitié. Il y en avoit aussi qui chérissoient la vermine, & celle-ci ne répondoit pas mal à leurs caresses. Ces cagots ambulans soulevoient le cœur des derviches, des calenders & des santons. On les avoit rassemblés, dans