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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/110

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Heureusement Colomb avait réponse à tout.

Le dernier de ces phénomènes n’avait pas été sans le surprendre un peu, d’abord ; il l’avait même tenu secret ; mais quand il le vit découvert, sa pénétration lui en avait déjà suggéré une explication, qu’il résuma en des termes dont la hardiesse fit le succès :

« Ce n’était pas l’aiguille aimantée qui avait perdu de sa vertu, c’était l’étoile polaire qui avait changé de place.(e) »

Si Colomb s’était contenté lui-même de cette explication, il nous serait permis d’en sourire ; mais il faut l’admirer d’avoir su, du moins, dans ses notes, poser scientifiquement cette question, qu’avec son équipage il dut résoudre à la façon expéditive d’un Alexandre.

Mais, on l’a déjà dit, c’est moins au fils de Philippe qu’à celui de Laërte qu’il convient de le comparer, sans oublier aucune des réserves qu’implique cette assimilation. À l’exemple du sage protégé de Minerve, il pratiquait admirablement la maxime : Aide-toi, le ciel t’aidera. Son explication des apparentes défaillances de la boussole vaut tout ce que Personne fit accroire au niais Polyphème, et l’artifice du livre d’estime tenu en partie double laisse bien loin en arrière les plus habiles stratagèmes d’Ulysse.

Au reste, comme ce dernier, il commandait à des hommes trop inférieurs à lui par le cœur et l’intelligence pour qu’avec eux tout ne fût pas de bonne guerre ; Colomb en jugeait ainsi, et avec raison ; mais tout son génie eût été insuffisant à les réduire, sans quelques-uns de ces coups du ciel dont il méritait le secours en agissant comme s’il n’eût compté que sur lui-même.

Tout s’était bien passé pendant les premiers jours de navigation,